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Numéro
31 Julian Charrière, galerie Perrotin, expositions, Paris

7 expositions à voir ce week-end à Paris

Art

Julian Charrière à la galerie Perrotin, Jesse Darling à la galerie Sultana, Jason Gringler chez Lo Brutto Stahl... Découvrez 7 expositions gratuites à visiter ce week-end dans les galeries parisiennes.

  • Vue de l'exposition “Julian Charrière. Panchronic Gardens” à la galerie Perrotin, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Julian Charrière. Panchronic Gardens” à la galerie Perrotin, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Julian Charrière. Panchronic Gardens” à la galerie Perrotin, Paris, 2024.

© Claire Dorn. Copyright the artist; VG Bild-Kunst, Bonn, Germany. Courtesy Perrotin.

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1. La première exposition de Julian Charrière à la galerie Perrotin

 

Nouvelle recrue de la galerie Perrotin, Julian Charrière y présente jusqu’au 1er juin un riche aperçu de son œuvre pluridisciplinaire, croisant aussi bien la vidéo que la sculpture, la photographie et l'installation. personnelle. Nourri par ses nombreux voyages aux quatre coins de la planète et ses recherches dans les champs de la géologie, de la physique ou encore de l’archéologie, le jeune Franco-Suisse développe une pratique axée sur la nature et son altération par les interventions humaines, du permafrost des icebergs du Groenland, transformés par le réchauffement climatique, aux volcans d'Éthiopie et d'Islande. Ainsi, au fond de la salle, une vidéo projette sur le mur l’image puissante d’une fontaine en flammes, illustration chaotique et dystopique d’un monde complètement asséché où l'eau a laissé place aux braises. Au sol, plusieurs roches volcaniques d'apparence brute révèlent en fait d'étonnants détails : des morceaux d’obsidienne sphériques et lisses incrustés dans la pierre, reflétant tels des hublots l’espace environnant sur leur surface noire. Sur les murs, des images brillantes réalisées par héliographie révèlent des paysages absrtaits traversés par des lignes sinueuses – celles que l'artiste a relevées dans les gisements d’hydrocarbures en Californie, tandis qu'une pièce tapissée de miroirs immerge dans un échantillon de jungle luxuriante, éclairé par une lumière rouge. Sans tomber dans un nihilisme aride ni un discours scientifique verbeux, Julian Charrière sublime le présent et imagine les lendemains d'une nature en mutation, dont il exalte toute la force poétique.

 

“Julian Charrière. Panchronic Gardens” / “Hernan Bas. The First and the last” / “Klara Kristalova. Beast”, exposition jusqu'au 1er juin 2024 à la galerie Perrotin, Paris 3e.

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2. De Miriam Cahn à Armineh Negahdari, les œuvres d'art pleurent à la galerie Derouillon

 

Que se passe-t-il quand on pleure ?”. À cette question-titre, l’exposition collective orchestrée par Marion Coindeau à la galerie Derouillon semble répondre dès l’introduction par un poème de l’auteure Jina Khayyer. Un mot y revient comme un cri : “Unconscionable”. "Inacceptables”, “déraisonnables” et “excessifs” effets de la violence, de la souffrance et de la rage sur un corps et un langage submergés par l’affect. Reste aux créateurs à donner forme à cette douleur pour mieux en reprendre le contrôle, sans jamais succomber à la facilité du détachement ou à la rationalisation des sentiments. C’est sur cette fine ligne d’équilibre que les six artistes invités à la galerie Derouillon se tiennent. Du corps rougeoyant peint sur toile par la légende vivante Miriam Cahn aux dessins acérés de la jeune artiste Armineh Negahdari, en passant par les épingles géantes de Mathilde Albouy et les sculptures fragiles en savon de Bri Williams les œuvres réunies ici refusent les images explicites trop séductrices ou tapageuses, explorant la manière dont la souffrance et la rage transforment notre corps et notre langage, et se métamorphosent en formes artistiques et poétiques. 


“What happens when we cry?” avec Mathilde Albouy, Miriam Cahn, Jina Khayyer, Keunmin Lee, Armineh Negahdari, Bri Williams, exposition jusqu'au 29 juin 2024 à la galerie Derouillon, Paris 2e. 

  • Vue de l'exposition “Aysha E Arar. Dear red bird, look at me in the eyes” à la galerie Sans titre, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Aysha E Arar. Dear red bird, look at me in the eyes” à la galerie Sans titre, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Aysha E Arar. Dear red bird, look at me in the eyes” à la galerie Sans titre, Paris, 2024.

© Aurélien Mole.

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3. Les mythologies émouvantes d'Aysha E Arar

 

Visages assoupis d'apparence paisibles, ou bien éveillés avec un regard intense, femmes-oiseaux, corps enlacés et êtres spectraux flottant dans des décors agrémentés de quelques mots calligraphiés en arabe, de cœurs et parfois de fleurs… Les dessins et peintures d’Aysha E Arar écrivent une nouvelle mythologie nourrie par les rêves de l'artiste et les légendes empruntées à sa Palestine natale. Affranchie de l’autorité rigide de la toile encadrée, la jeune peintre, vidéaste et poète pense plutôt ses corpus d'œuvres comme des fresques composites, incluant larges textiles blancs, morceaux de tissus assemblés jusqu'aux cimaises vierges, où elle esquisse au crayon de couleur, fusain et pastel des figures en quelques lignes douces et continues. Une œuvre délicate autant qu'émouvante que l’on peut, par chance, découvrir, simultanément dans deux expositions parisiennes, à la Dvir Gallery et à la galerie sans titre. Il y a quelques semaines, cette dernière accueillait une performance inédite de l’artiste qui, accompagnée d'une flûtiste et une joueuse d’oud, interprétait solennellement plusieurs chants au milieu de ses œuvres. Alors que le Proche-Orient vit depuis des mois l'une de ses guerres les plus meurtrières, une tête noire sur fond écarlate sur le point d'engloutir un œil géant à la pupille émeraude semble, sur l'une de ses pièces, inciter chacun à garder les yeux ouverts sur cette région, avant que notre attention ne soit engloutie par l'oubli, la dissimulation et l'indifférence. Des scènes aussi émouvantes qu'énigmatiques où résonne “un cri silencieux pour la liberté”. 

 

“Aysha E Arar. Dear red bird, look at me in the eyes”, exposition jusqu'au 1er juin 2023 à la galerie Sans titre, Paris 3e. “
“Aysha E Arar. There was love, there was death and there was you”, jusqu'au 13 juillet 2024 à la Dvir Gallery, Paris 3e.

  • Vue de l'exposition de Jesse Darling à la galerie Sultana, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition de Jesse Darling à la galerie Sultana, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition de Jesse Darling à la galerie Sultana, Paris, 2024.

© Grégory Copitet.

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4. Les sculptures fragiles de Jesse Darling, du Turner Prize à la galerie Sultana

 

Lauréat du prestigieux Turner Prize en 2023, Jesse Darling dévoilait au Royaume-Uni il y a quelques mois une grande installation dont les composantes résumaient à elles seules l'essence de son œuvre. Échelle sinueuse sortant d'un trou creusé dans le mur, barrières en métal déformées, comme les traces d'un conflit opposant manifestants et forces de l'ordre, morceaux de bois maintenus par des béquilles, classeurs alignés sur des bibliothèques branlantes, ou encore corps de poupées accumulés sur une étagère recouverte d’une nappe en dentelle… Bancals et précaires, jusqu'à se trouver sur le point de s’effondrer, ces artefacts désormais exposés à la galerie Sultana forment un aperçu percutant de l'œuvre de l'artiste britannique irrévérencieux : des sculptures “non macho”, volontairement fragiles et désobéissantes, dégonflant “ce présupposé ambiant que la validité d’une forme, d’une construction, d’une installation tiendrait à sa réalisation complète, pleine, entière, propre”, écrivait Élisabeth Lebovici dans Numéro art. À travers leurs formes inachevées, leur apparence absurde et parfois grotesque, Jesse Darling déconstruit les systèmes de domination rigides régissant notre monde contemporain, de l’architecture urbaine aux canons de l’histoire de l’art en passant par les institutions politiques : incarnation matérielle d'une société profondément instable, le corpus présenté à Paris livre par exemple un commentaire grinçant sur l’effondrement du Royaume-Uni post-Brexit.

 

“Jesse Darling”, exposition jusqu'au 1er juin 2024 à la galerie Sultana, Paris 3e.

  • Vue de l'exposition “Jason Gringler. Studio” à la galerie Lo Brutto Stahl, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Jason Gringler. Studio” à la galerie Lo Brutto Stahl, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Jason Gringler. Studio” à la galerie Lo Brutto Stahl, Paris, 2024.

Courtesy of the artist & Lo Brutto Stahl, Paris. © Nicolas Brasseur.

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5. Jason Gringler sculpte les déchets de demain

 

À l’heure de l’obsolescence programmée et de la pollution qu’elle engendre, quel avenir pour les outils technologiques hors d’usage, appareils électroniques et autres déchets industriels produits par notre époque ? L’exposition personnelle de Jason Gringler à la galerie Lo Brutto Stahl en livre une hypothèse. Depuis une dizaine d’années, l’artiste canadien conserve dans son atelier berlinois les chutes des matériaux qu'il utilise et les morceaux de ses œuvres qu'il a détruites, en même temps qu'il écume le site de revente eBay ou encore les stocks de magasins à la recherche d'objets du quotidien défectueux, rejetés ou revendus par leurs propriétaires et leurs fabricants. Autant d’éléments considérés comme “inutiles” dont le plasticien fait le noyau dur d'œuvres abstraites, où prime la brutalité du matériau. Coulés dans la résine, comprimés entre deux plaques de Plexiglas ou encore encadrés par des structures en acier, ces fragments forment des blocs et autres assemblages dont les traces d'usure deviennent un motif esthétique, entre le métal grignoté par la rouille, les morceaux de scotch partiellement arrachés et les fissures du verre brisé. Ces œuvres, accrochées aux murs ou posés au sol de la galerie, deviennent des nouvelles formes de stèles qui pourraient bien composer le cimetière de demain.

 

“Jason Gringler. Studio”, exposition jusqu'au 15 juin 2024 à la galerie Lo Brutto Stahl, Paris 3e.

  • Vue de l'exposition “Antoine Donzeaud. rien sans peine” à la galerie Spiaggia Libera, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Antoine Donzeaud. rien sans peine” à la galerie Spiaggia Libera, Paris, 2024.

  • Vue de l'exposition “Antoine Donzeaud. rien sans peine” à la galerie Spiaggia Libera, Paris, 2024.

Courtesy the artist & Spiaggia Libera, Paris. © Aurélien Mole

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6. Antoine Donzeaud chez Spiaggia Libera : quand la ville s'invite dans la chambre à coucher

 

La galerie Spiggia Libera nous accueille avec une image familière. Imprimés à échelle 1 sur une grande bâche bombée, tendue sur une structure circulaire aussi haute qu’un paravent, deux clichés juxtaposés livrent l'image de deux chambres à coucher, l'une baignée par des tons roses, l'autre par des tons bleus. Éclairés par la lumière du jour, leurs lits défait se joignent en leur milieu, comme s'ils attendaient le retour de leurs propriétaires. En utilisant la sérigraphie, la peinture, la photographie ou encore la vidéo, Antoine Donzeaud étudie et se réapproprie les espaces habités et traversés par l'être humain, tels les parois qui séparent le monde du dehors et celui du dedans, conditionnant nos habitudes et nos modes d'interaction. La seconde salle de l'exposition en offre un exemple toujours plus éloquent : rideau à persiennes blanches, écran vertical posé au sol, où des visages se livrent sans filtre face caméra à l'image des vidéos postées sur les réseaux sociaux, faux plafond recouvert d'une bâche transparente, sur lequel l'artiste français a tracé à l'aérosol des lignes colorées... Qu'il gratte les surfaces du monde ou les recouvre de graffitis, Donzeaud repousse les limites de la peinture autant que de l’espace d’exposition, créant l'ambiguïté entre les architectures urbaine, domestique et virtuelle. Ainsi, la dichotomie entre l’intime et l’extime se dissout et brouille nos répères tandis que ces structures banales, désormais déconstruites, révèlent leur fausse neutralité.

 

“Antoine Donzeaud. rien sans peine”, exposition jusqu'au 22 juin 2024 à la galerie Spiaggia Libera, Paris 3e.

  • Juanita Care, “Virus” ("Inside” series) (2022).

  • Juanita Care, “Virus” ("Inside” series) (2022).

© Juanita Care.

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7. Juanita Care, le créateur qui redécore les cavités buccales

 

Il n’est pas si fréquent de voir un créateur de bijoux exposer dans une galerie d’art. Pourtant, ce pas supplémentaire vers le monde des arts visuels semble tout à fait cohérent pour Juanita Care, projet fondé en 2017 par Adrien Flores et désormais basé au Mexique. Sans doute parce que, dans les créations de ce diplômé de la Villa Arson, ce sont avant tout les images qui attrapent le regard du spectateur : celles de bouches béantes, entrouvertes ou fermées et de leur intérieur en gros plan, dont l'esthétique crue et sombre se situe bien loin des campagnes polissées de la haute joaillerie. C’est précisément en partant de cette partie du corps, plus rarement exploitée dans l'univers du bijou, que le designer a construit l'ADN de son label, qui produit depuis des bijoux plus classiques – bagues, boucles d’oreilles, colliers... Inspiré par le grillz, accessoire dentaire plébiscitée par le milieu du hip-hop, Adrien Flores a imaginé avec l’aide de son frère spécialiste en modélisation 3D des ornements buccaux sur-mesure en métal argenté, encadrant les formes des dents, prenant l’empreinte des lèvres ou décorant le palais. Chez Goswell Road, Juanita Care prouve combien la puissance de ses images, même délestées de leur fonction promotionnelles, peut suffire à exprimer la radicalité et la singularité esthétique de son projet. Une proposition curatoriale qui, comme de coutume pour les deux fondateurs du lieu, s’accompagnent d’une publication réalisée pour l’occasion.

 

“Juanita Care. Violence Starts in The Mouth”, du 1er au 29 juin 2024 chez Goswell Road, Paris 10e.